L’Institution financière souligne l’importance de parvenir à une croissance plus inclusive pour garantir la marche en avant de l’économie ivoirienne dans la durée.
Selon l’Institution de Bretton Woods, pour la première fois depuis 1984, le taux de pauvreté est à la baisse en Côte d’Ivoire. Le revenu national s’est accru de 80% entre 2012-2015 et le taux de pauvreté est passé de 51% en 2011 à 46% en 2015. Le revenu moyen réel par tête a augmenté de 32% depuis 2012. Cependant, révèle la Banque Mondiale, l’épisode en cours de croissance accéléré n’a pas été suffisamment inclusif. Selon elle, ces résultats peuvent être améliorés car ils indiquent que chaque accroissement de 1% du revenu par habitant dans le pays n’a réduit le taux de pauvreté que de 0,25 points en Côte d’Ivoire alors que cette élasticité est de 1,9 points en Afrique Sub-Saharienne et même de 3,3 points pour plusieurs pays en dehors du continent. « Ils sont en général confirmés par l’évolution de variables non-monétaires puisque l’accès à l’eau potable, à un marché, à un centre de santé s’est dégradé pour les plus pauvres de 10,4% ; 10,8% et 4,9% entre 2008 et 2015. Ceux-ci ont également enregistré une diminution du nombre de biens durables en leur possession (environ -1%), en revanche, leur accès à l’électricité s’est légèrement amélioré (+11,1% entre 2008 et 2015) ainsi que celui à l’assainissement (+7,4%) et surtout à l’éducation primaire (+21,3%) », lit-on dans le dernier rapport économique de l’Institution financière dénommé « Que la route soit bonne : Améliorer la mobilité urbaine »,mis officiellement à la disposition des décideurs publics au mois de février 2019 lors d’une cérémonie organisée à cet effet.
« Les explications derrière la faible inclusion de la croissance économique sont au moins de trois ordres », avance ce Rapport. La première explication qui en ressort, c’est que la concentration de cette croissance autour d’un nombre restreint de secteurs modernes à Abidjan a limité ses bénéfices et son impact pour les pauvres, qui se trouvent majoritairement en zones rurales. Les secteurs porteurs d’emplois n’ont pas enregistré des performances suffisamment positives sur la durée pour engendrer des gains de revenus substantiels pour leurs travailleurs. Par exemple, les paysans ont eu une bonne année en 2017, alors que l’année précédente avait été relativement mauvaise. Le secteur informel urbain, en particulier le commerce, qui accueille de plus en plus de travailleurs a enregistré une baisse de sa productivité ce qui s’est traduit par des revenus moins élevés. L’exception semble être le secteur de la construction, qui a explosé depuis 2012, créant de nombreux emplois.
La seconde explication est liée aux chocs exogènes qui rendent vulnérables de nombreux ménages : Les inondations ou a contrario la sécheresse peuvent détruire les récoltes et anéantir le dur labeur des fermiers, qui ne sont généralement pas assurés. Un ménage peut perdre son logement pendant la saison des pluies. Au-delà des risques climatiques, de nombreux opérateurs sont exposés aux variations de prix sur les marchés mondiaux. Cette vulnérabilité est illustrée par l’exemple des producteurs de cacao qui doivent faire face aux variations des prix internationaux et à des conditions climatiques imprévisibles.
Enfin, malgré des efforts importants pour améliorer l’accès aux services et aux infrastructures de base, leur impact est certainement décalé sur le portefeuille et le bien-être des ménages les plus pauvres. A cet égard, le gouvernement, dans le cadre de son action sociale, a mené une politique de revalorisation des rémunérations avec le relèvement des salaires minimum, le déblocage des salaires des fonctionnaires et agents de l’Etat restés inchangés depuis 1989 et l’instauration des avancements indiciaires tous les deux ans.
Les autorités ont mis en place un projet visant à connecter tous les villages d’au moins 500 habitants, qui a permis de favoriser l’accès à l’électricité à 2077 localités à fin 2018 et devrait atteindre la cible de 2531 localités en 2019, pour ensuite couvrir tout le territoire en 2025. Par ailleurs, en réduisant le coût d’accès aux branchements à 1000 FCFA au lieu de 150.000 FCFA, le gouvernement a permis à 400.000 ménages pauvres d’avoir un branchement électrique. Tous ces efforts devraient s’accélérer en 2019 et 2020 avec l’annonce d’un nouveau programme social par le Président de la République lors de son allocution de fin d’année.
Ce programme vise à fournir aux populations des services de santé de proximité, des conditions d’accès à l’école plus améliorées, à faciliter l’accès aux logements, à l’énergie et à l’eau potable, accroître l’employabilité des jeunes ainsi que le bien-être des populations en zones péri-urbaine et rurale. Le gouvernement devrait continuer sur cette lancée dans la mesure où l’impact de certains investissements sur le quotidien des ménages peut être décalé.
Par exemple, l’augmentation des taux de fréquentations scolaires ne se répercutera sur la qualité de la force de travail que lorsque les élèves arriveront au terme de leur cursus et entreront sur le marché du travail. La construction d’une route prend plusieurs années. Réduire la taille moyenne de la famille ivoirienne ou encourager les femmes à mieux s’instruire, qui sont des facteurs explicatifs de la réduction de la pauvreté, ne peuvent être que des actions graduelles à cause de résistances culturelles et sociales.