Le Président du Groupe AVOS comprenant les entreprises SIPRA, LMCI et SARES était l’invité de la seconde édition de la conférence inspirante dénommée CEO TALK HEC co-organisée, le 3 mai 2019 au siège du Patronat ivoirien, par les anciens étudiants (Alumni) de la prestigieuse business school française HEC et son Bureau régional installé en Côte d’Ivoire.
Le conférencier, riche de son expérience professionnelle acquise par des années de pratique managériale dans le secteur de l’agro-alimentaire a tenu en haleine son auditoire pendant plus d’une heure et demie.
Ackah Jean-Marie est avant tout un capitaine d’industrie. Il est le Président Directeur Général (PDG) du Groupe AVOS comprenant trois Sociétés à savoir, la Société ivoirienne de productions animales (SIPRA), une entreprise agro-industrielle spécialisée dans l’ensemble de la chaîne de valeur de la filière avicole ; les Moulins de Côte d’Ivoire (LMCI), une entreprise spécialisée dans la minoterie, et une chaîne de Fast Food avec la marque Tweat commercialisée par la Société Africaine de Restauration (SARES).
Ayant débuté sa carrière professionnelle comme cadre supérieur à la Palmindustrie, une société à capital public, il rejoint ensuite SIPRA, la filiale ivoirienne du Groupe français Evialis France qu’il dirige dans les années 80. Cette entreprise avait alors un chiffre d’affaires relativement modeste (2 milliards FCFA) et une centaine de salariés. Sous la férule de M. Ackah Jean-Marie, la SIPRA amorce son développement des années plus tard, plus exactement dans les années 90 quand M. Ackah Jean-Marie prend le contrôle de l’entreprise SIPRA en tant qu’actionnaire de référence.
En effet, avec l’aide du fonds d’investissement WEST AFRICA, il rachète SIPRA aux Français et décline une stratégie de développement basée sur une vision holistique qui prend en compte tous les maillons de la chaîne de la filière avicole. Grâce à sa témérité et à la capacité de résilience de son entreprise face aux chocs exogènes et endogènes liés aux diverses crises mondiales conjoncturelles et à l’instabilité socio-politique des années 90, il réussit presque 30 ans après à positionner SIPRA comme l’un des fleurons industriels de la Côte d’Ivoire.
Cette réussite qu’on lui reconnait a été minutieusement bâtie au travers de décisions optimales fondées sur une vision de croissance à long terme. « Quand je deviens le Président Directeur Général de SIPRA ; la première décision que je prends, c’est la restructuration de l’entreprise, en transférant son siège à l’usine et parallèlement, je fais des investissements », dixit M. Ackah.
Une expérience au service des jeunes
« J’ai acquis de l’expérience avec le temps et l’âge » ; lâche le conférencier qui s’est inscrit dans une dynamique de partage d’expérience avec les dirigeants d’entreprises et les jeunes entrepreneurs présents à ce CEO TALK.
Cette expérience, il a décidé de la mettre, du reste, à la disposition des jeunes aspirant à l’entrepreneuriat à travers la plateforme CGECI ACADEMY organisée chaque année par la Confédération Générale des Entreprises de Côte d’Ivoire(CGECI).
Le conférencier a conseillé aux jeunes entrepreneurs de croire en leur projet et de se donner les moyens de le réaliser. « N’hésitez pas surtout à faire le tour des fonds d’investissement qui, aujourd’hui, sont de plus en plus nombreux. D’ailleurs, ils n’hésiteront pas à investir dans un projet bien structuré. C’est toujours possible d’arriver à convaincre un fonds d’investissement » ; avance M. Ackah Jean-Marie qui est également, Président de la Fédération des Patronats d’Afrique de l’Ouest(FOPAO).
Pour en revenir à l’entreprise SIPRA ; le conférencier a expliqué que son développement graduel s’est fait en intégrant le Système d’information, notamment les nouvelles technologies au cœur des métiers. Pour lui, les marges très minimes dégagées par son secteur d’activité exige une gestion à la virgule près qui ne peut être possible qu’en se conformant aux exigences strictes des outils technologiques actuelles.
Le Franc CFA
Se prononçant sur le Franc CFA, la monnaie communautaire, décriée par une partie de la communauté intellectuelle africaine, le conférencier a expliqué que cette monnaie n’est pas en elle-même un problème mais sa compétitivité et sa force devrait résider dans la capacité des Etats qui l’utilisent à bien les agrégats macroéconomiques mais également dans la capacité des entreprises à être performantes.
L’intégration africaine
Le conférencier a exprimé son désarroi face à l’éventualité de la levée des barrières tarifaires par l’Etat ivoirien sans qu’aucune garantie préalable visant à rassurer les industriels de la filière avicole ne soit prise. « Cette filière est assez structurante et elle fait vivre des dizaines de milliers de familles. Si les barrières tarifaires sont levées, nous serons dans une situation de concurrence déloyale et nous serons envahis par les produits étrangers. En Europe, la filière avicole est subventionnée et les produits exportés par les pays européens sont des sous-produits pour eux alors que chez nous, c’est le cœur de nos activités. Si notre pays doit lever les barrières tarifaires et ouvrir grandement son marché aux exportateurs européens, américains asiatiques … alors les producteurs locaux doivent bénéficier de subventions ou à tout le moins, être protégés », fait savoir le PDG de SIPRA.
Pour lui, il est important de consolider les blocs régionaux et raffermir l’intégration dans les Communautés Economiques Régionaux (CER) notamment au niveau de l’UEMOA et de la CEDEAO avant d’ouvrir à une échelle continentale les marchés nationaux. S’il se réjouit des implications positives de la Zone de Libre Echange Continentale de l’Afrique (ZLECAF), il reste néanmoins persuadé que la croissance économique inclusive pour les économies du Continent trouve une part de solution dans l’émergence de champions nationaux capables de consolider les marchés locaux et de se projeter à l’international.
Pour autant, le conférencier croit en l’Afrique, plus particulièrement à l’intégration sous régionale et à la coopération sud-sud. Ainsi, avec ses équipes, il a développé une stratégie de conquête du marché régional. Il entend apporter sa modeste contribution à la politique alimentaire dans certains pays et mettre l’expérience acquise par son entreprise dans l’agro-industrie au service des Etats de la communauté ouest-africaine dans lesquels ils ont implanté des filiales. « La protéine animale est de plus en plus la protéine la moins chère, elle pourrait être une solution crédible dans la politique alimentaire développée par nos Etats. SIPRA a développé l’ensemble de la chaîne des valeurs. Nous nous sommes inscrits dans la restauration avec des Fast-foods dans une approche industrielle. Nous entendons bâtir une chaîne industrielle continentale ».
Pour le CEO de SIPRA, les enjeux de l’agro-industrie dans les 5 ou 10 années à venir se trouvent dans les caractéristiques démographiques du continent africain : « Les pays africains se caractérisent par une démographie forte qui s’urbanise. La demande alimentaire va aller croissante, c’est une opportunité pour le secteur agro-alimentaire qui évolue de plus en plus vers des spécificités de qualité affirmée »
Ackah croit en l’agro-industrie qui, pour lui, est un levier important de développement. C’est à juste titre qu’il affirme un brin convaincu que « l’agro-alimentaire va nourrir les populations et l’agro-industrie transformer industriellement les productions locales ».
L’endurance et la persévérance
« Entreprendre demande beaucoup de travail, énormément de rigueur et de la résilience. Il faut se lancer dans l’entrepreneuriat pour bâtir une entreprise résiliente C’est un état d’esprit qu’il faut avoir dans une période difficile. Il est nécessaire de réaliser son modèle d’affaires et de le revisiter à chaque fois que les choses ne marchent pas. Il faut être transparent et bien structurés. Une autre chose et non des moindres, c’est qu’il faut connaître ce que l’on veut faire. L’échec en affaire n’est pas définitif, fatal ou condamnable dans l’absolu», a fait brillamment savoir le conférencier.
Le PDG du groupe AVOS (SIPRA – LMCI – SARES) a mis par ailleurs en exergue son appétence pour l’intégration économique mais pour lui, cela ne saurait être possible pour une entreprise que si elle a une maturité dans son secteur d’activité.
De la maturité, l’entreprise SIPRA en a. Elle exporte plus de 25% de ses produits et dans les 18 mois à venir, elle ouvrira une autre filiale au-delà des frontières ivoiriennes.
70 milliards FCFA de chiffres d’affaires en 2016 et 25 milliards FCFA d’investissement sur la période 2016-2020
Le groupe a investi 5 milliards de FCFA (environ 7,6 millions d’euros) dans une sa grande usine d’alimentation animale à Yamoussoukro.
Le site débute ses activités avec une capacité de production de 120 000 tonnes par an. Les produits sont commercialisés sous la marque Ivograin. L’entreprise s’est orientée vers l’aliment du gros bétail (bovins, ovins et caprins) et passera à 200 000 tonnes.
Le groupe, géant local de l’aviculture compte aussi à tour de table la Société Financière Internationale (IFC, Groupe Banque mondiale), le capital-investissement Phoenix Capital, le groupe d’assurances Saham et la banque Bicici (filiale du français BNP Paribas). L’usine est approvisionnée par de grandes exploitations locales de maïs.
Filiale au Burkina
Au cours des dernières années, SIPRA (70 milliards de FCFA de chiffre d’affaires en 2016, soit 106,7 millions d’euros) avait investi 16 milliards de FCFA pour son programme de développement portant sur la création de fermes avicoles et la modernisation de son outil de production. Le groupe basé à Abidjan s’est implanté dans la sous-région en 2016 avec la création de la Société burkinabè de productions animales (SOBUPRA) qui a pour objectif de développer et mettre en route un couvoir moderne de poussins d’un jour. SIPRA envisage d’aller à l’assaut de l’ensemble de l’Afrique de l’ouest de 2016 à 2020 et investira 25 milliards de FCFA au cours de cette période.
Le groupe compte plusieurs filiales dont la Société Africaine de Bétail du Bélier (SAAB), Les Moulins de Côte d Ivoire (LMCI) ou encore la Société Africaine de Restauration (Sares) qui, en partenariat avec le pétrolier français Total, développe la chaîne de restauration rapide TWEAT.